Il convient de saluer l’événement : le dernier congrès du Comité international d’histoire de l’art (CIHA) organisé en France remonte à 1989. Il avait pour thème « L’art et les révolutions », en référence à la Révolution française, dont on célébrait alors le bicentenaire. Cette année, c’est la capitale de Gaules qui accueille la manifestation. « C’est un très grand plaisir et un grand honneur d’accueillir en France le 36e congrès du Comité international d’histoire de l’art, a déclaré Olivier Bonfait, président du Comité français d’histoire de l’art. La première réunion de ce type a eu lieu en 1873, il y a plus de 150 ans, à Vienne, et ces congrès ont été essentiels pour faire de l’histoire de l’art une véritable discipline qui dépasse les discours nationalistes ou centrés sur le continent européen. »
Lors de la cérémonie d’ouverture le 23 juin, Éric de Chassey, directeur de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), a salué « une rencontre scientifique et culturelle mondiale qui vise à partager et diffuser la recherche grâce au rassemblement des communautés les plus diverses de l’histoire de l’art et du patrimoine ». Avant d’ajouter : « Dans le contexte actuel, où l’hostilité à l’encontre de celles et ceux que l’on juge étrangères ou étrangers croît en France et en Europe, ce congrès du Comité international d’histoire de l’art revêt une importance particulière. Tant qu’ils sont pris au sérieux, par une expérience concrète, l’art et la culture offrent un modèle d’ouverture aux autres, précieux pour l’ensemble de la société. Se laisser toucher par les œuvres de la culture et des arts, les étudier, essayer de les comprendre, c’est accepter de s’ouvrir au point de vue d’autrui, de voir avec des yeux qui ne sont pas les nôtres, d’entendre ou de lire des mots qui ne sont pas les nôtres, d’écouter une musique qui n’est pas la nôtre, de vivre des actions, des gestes et des récits qui ne sont pas les nôtres, d’appréhender des modes de pensée qui ne sont pas les nôtres – mais qui, si nous les acceptons, peuvent rejoindre, enrichir, éclairer nos habitudes de regard, de parole, d’écoute, de comportement, de pensée. Les arts, bien qu’ils puissent être utilisés à des fins xénophobes, sont intrinsèquement xénophiles, car ils sont basés sur des dialogues qui transcendent toute frontière, car même lorsqu’ils dépendent d’une volonté d’établir une spécificité, celle-ci n’a de sens qu’à l’intérieur d’un réseau pluriel. Ils reposent sur l’accueil des étrangers et s’opposent à leur rejet ou à la limitation de leurs droits. […] Le principe même d’un congrès international s’oppose à une vision nationaliste et raciste de l’histoire de l’art. Nous ne sommes pas des sportifs. Nous ne nous réunissons pas ici pour une compétition, mais pour une émulation, nous ne nous battrons pas les uns contre les autres, mais nous partagerons, car nous essayons passionnément d’approfondir nos connaissances. Et c’est mon souhait le plus profond de voir cela comme un signal pour toutes nos sociétés. »
« Le thème choisi pour ce congrès, "Matière Matérialité", montre que l’histoire de l’art, l’étude et la valorisation du patrimoine ont toutes leurs places dans le monde d’aujourd’hui, dans la recherche en sciences dites exactes, les sciences du patrimoine, comme dans la vie de la cité », a poursuivi Olivier Bonfait.
Le programme scientifique, durant six jours, examine des thèmes aussi divers que « Les matérialités de la photographie », « La crise du smalt dans la peinture vénitienne du XVIe siècle », « L’usage du béton dans la construction de logements à La Réunion dans les années 1960-1970. Imaginaires et formes de créolisation », « Vie et mort dans les automates de la Renaissance : l’exemple de l’horloge astronomique de Strasbourg » ou encore « Matière et forme. Retour sur la théorie de l’hylémorphisme dans la théorie des arts au premier âge moderne ».
Parmi les invités des conférences figurent Orhan Pamuk, Prix Nobel de littérature 2006, l’écrivain et historien de l’art Georges Didi-Huberman (École des hautes études en sciences sociales, Paris), le paysagiste Gilles Clément ou Pierre Rosenberg (de l’Académie française, président-directeur honoraire du musée du Louvre) au musée des beaux-arts de Lyon. Un dîner-performance de Daniel Spoerri, intitulé Un coup de dés n’abolira jamais le hasard, est organisé au musée d’art contemporain de Lyon.
En parallèle, un programme culturel propose, entre autres, des visites des galeries d’art, musées et centres d’art et d’architecture à Lyon, des excursions pour découvrir le patrimoine de la Bresse, les musées de Grenoble ou l’architecture du Rhône – le couvent de la Tourette, bâtiment iconique de Le Corbusier, ou le Château de la Chaize.
Le programme complet des nombreux événements, rencontres et conférences ainsi que la liste des intervenants internationaux sont disponibles sur le site de la manifestation.
Le 36e congrès du CIHA est organisé sous l’égide du Comité français d’histoire de l’art (CFHA) dans un partenariat entre le CFHA, l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), l’Université Lumière Lyon 2 et le Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA CNRS UMR 5190).