Ce lundi 14 octobre, ont été présentés au jury international les projets des artistes nommés pour l’édition 2024 du prix Marcel-Duchamp exposés au Centre Pompidou, à Paris, jusqu’au 6 janvier 2025 : Gaëlle Choisne (rapporteur : Thomas Conchou), Abdelkader Benchamma (rapporteur : Christian Bernard), Angela Detanico / Rafael Lain (rapporteur : Sébastien Delot) et Noémie Goudal (rapporteur : Alona Pardo).
À l’issue de la présentation des quatre projets par leurs rapporteurs respectifs, puis des délibérations, le jury a annoncé au Centre Pompidou que le prix Marcel-Duchamp 2024 était décerné à Gaëlle Choisne.
« Inlassable fabricatrice d’environnements artistiques qui débordent le cadre de l’exposition pour imaginer des banquets, des ateliers de pratique collective, du jardinage, des soins corporels ou encore des concerts et des performances, Gaëlle Choisne construit depuis dix ans une œuvre-archipel expérimentale et plurielle, a argumenté devant le jury son rapporteur Thomas Conchou. Résolument curieuse, sa pratique embrasse une multitude de médiums et de savoir-faire qu’elle détourne créativement sans se soucier du canon ou de la tradition. Fervente adepte des esthétiques kitsch, ses œuvres charrient avec elles des objets de circulation courante (pièces, cigarettes, porte-clés, faux-ongles), des grigris ou autres trouvailles soigneusement collectionnés. Constructrice formée à la scénographie, elle manipule avec la même affection des matériaux industriels (plâtre, béton, silicone), la céramique ou les métaux précieux. À partir de cette position d’impureté référentielle qui traverse son œuvre, elle traite la question de l’image et de l’archive en auto-ethnographe, c’est-à-dire en trafiquant les systèmes de représentation coloniaux par une pratique de la vidéo et de la photographie à la fois réflexive et anthropologique. »
« Gaëlle Choisne présente au Centre Pompidou un immense tapis de liège coulé sur lequel cinq monolithes figurent des ruches, des terriers ou des termitières. Ornés de pièces de métal ouvragées, de chaînes et de coquillages, ces promontoires accueillent de petits théâtres vidéo diffusant cinq films réalisés par l’artiste depuis 2020 au gré de ses voyages à Haïti, dans les Caraïbes ou en Amérique latine. Initialement formée dans les arts dramatiques, on retrouve dans ce geste de miniaturisation son intérêt pour les réflexions de Brecht et du théâtre épique qui entend faire percevoir au spectateur sa position au sein de l’œuvre. Depuis cette station d’observation stellaire qui joue avec les échelles, le public peut se pencher sur diverses activités humaines : dans L’école des actes, la fabulation collective et la revendication de parcours d’exil en région parisienne ; dans Accumulation primitive, une fable féministe politique et poétique sur Haïti ; dans Creole garden in Normandie, un jardinage sensuel dans lequel les plantes campent les personnages principaux. Au fond de la salle, les immenses tableaux sur bois de la série Safe space for a passing History - Ere du verseau 99999 mêlent des surgissements picturaux, des glyphes et des talismans à des visages d’inconnus générés par IA. À la fois hommage aux activistes des luttes de libération noires et arbre généalogique fictionnel, ils agissent comme une cartographie cosmogonique qui nous tient en question : où sommes-nous ? »
« Ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre, chaque édition du prix Marcel-Duchamp est un hommage à la scène française actuelle qui, cette année encore, est superbement réussi !, a salué Claude Bonnin, président de l’Association pour la diffusion internationale de l’art français (Adiaf). Je félicite la lauréate et les finalistes qui vont pouvoir bénéficier du dispositif d’accompagnement de notre association : expositions internationales, résidences au sein de la Manufacture de Sèvres et de la Villa Albertine. Cette édition est toutefois singulière puisque, après avoir été accueillie pendant 24 ans par le musée national d’Art moderne, la prochaine exposition du prix Marcel-Duchamp ne pourra avoir lieu au Centre Pompidou qui va fermer pour travaux. Nous avons donc collégialement cherché un lieu " hors les murs " et je suis heureux de vous annoncer qu’à la suite d’un partenariat entre l’Adiaf, le Centre Pompidou et Paris Musées, les prochaines expositions du prix Marcel-Duchamp auront lieu au musée d’Art moderne de Paris de 2025 à 2029. Je tiens à remercier chaleureusement les directions et les équipes des deux musées de leur future collaboration qui, j’en suis certain, sera exemplaire. »
Le jury international de cette édition 2024 était composé de Xavier Rey, directeur du musée national d’Art moderne, Centre Pompidou, Paris ; Claude Bonnin, collectionneur, président de l’Adiaf (Association pour la diffusion internationale de l’art français) ; Akemi Shiraha, représentante de l’association Marcel Duchamp ; Estelle Francès, collectionneuse, cofondatrice et directrice de la Fondation Francès ; Frédérique Goerig-Hergott, conservatrice en chef, directrice des Musées de Dijon ; Thomas Hirschhorn, artiste ; Glenn D. Lowry, The David Rockefeller directeur du Museum of Modern Art, New York ; Otobong Nkanga, artiste ; et Alain Servais, collectionneur.
« Prix Marcel-Duchamp 2024. Les nommés », commissaire : Jeanne Brun, du 2 octobre 2024 au 6 janvier 2025, Centre Pompidou, place Georges-Pompidou, 75004 Paris.