L’exposition inaugurale du Grey Art Museum dans ses nouveaux espaces du 18 Cooper Square renoue avec les études des grands moments culturels qui ont longtemps été la marque du musée de l’université de New York, anciennement appelée Grey Art Gallery.
Pour son exposition « Americans in Paris: Artists Working in Post-war France, 1946-62 » [« Américains à Paris : les artistes travaillant dans la France de l’après-guerre, 1946-1962 »], l’universitaire Debra Bricker Balken et Lynn Gumpert, directrice du musée [et auteure de la première monographie sur l’artiste français Christian Boltanski, publiée en 1992, NDLR], se sont penchées sur le phénomène de l’afflux d’artistes américains dans la capitale française après la Seconde Guerre mondiale.
L’exposition comprend plus de 130 œuvres réalisées à Paris par environ 70 artistes. Nombre d’entre eux, dont Herbert Gentry, Ellsworth Kelly, Jack Youngerman et Kenneth Noland, se sont rendus dans la Ville Lumière grâce au GI Bill, loi américaine qui permettait aux vétérans de l’armée de bénéficier d’une bourse pour poursuivre leurs études. « Le GI Bill leur permettait de se rendre à Paris et de s’inscrire directement dans l’une des académies d’art sans avoir à déposer de dossier, contrairement à ce qui se pratiquait alors, explique Debra Bricker Balken. Ils recevaient une allocation de 75 dollars par mois et 25 dollars pour les livres, ce qui représentait une somme considérable dans la France de l’après-guerre. »
D’autres artistes, comme Carmen Herrera, Joan Mitchell et Claire Falkenstein, ont été attirés par le sentiment de liberté de la grande ville européenne. Des artistes noirs comme Beauford Delaney, Ed Clark et Harold Cousins s’y sont installés « en partie parce que Paris était une ville plus accueillante pour les Afro-Américains », explique Debra Bricker Balken.
L’exposition met également en lumière des figures peu connues, comme le sculpteur américano-japonais Shinkichi Tajiri, qui s’est engagé dans l’armée pour échapper à l’internement. Après s’être installé à Paris grâce au GI Bill, il a cofondé la Galerie Huit en 1950, qui a exposé pendant six ans des artistes américains, notamment Al Held, Sam Francis et Shirley Jaffe. Avec cette exposition, les commissaires souhaitent « montrer que la réalité était bien plus diverse et ne se limitait pas aux seules personnes reconnues par l’histoire de l’art », explique Lynn Gumpert.
« Americans in Paris : Artists Working in Post-war France, 1946-62 », jusqu’au 20 juillet 2024, Grey Art Museum, 18 Cooper Square, New York.