La foire étend son territoire cette année en incluant l’Inde pour la première fois. Est-ce pour vous une scène encore pas assez défrichée en Occident ?
Nous ne l’avions encore jamais abordée à ASIA NOW. Notre objectif était de montrer des artistes, des scènes jusqu’ici passées sous le radar de ce côté-ci du globe. Notre mission, c’est de les mettre en avant. L’idée est née d’un voyage en Inde avec la société des Amis du musée Guimet, la même semaine que l’India Art Fair, un voyage d’exploration dont je suis revenue conquise. Plusieurs galeries présentent ainsi dans cette édition un ou des artistes indiens. Nous montrons également une œuvre de Remen Chopra W. Van Der Vaart, qui a participé au « off » de la Biennale de Venise en 2015, dans l’exposition « My East Is Your West ». Son titre m’avait interpellée. Il souligne l’importance du décentrement et du dépaysement du regard qui fait que l’Est peut-être aussi l’Ouest. Nous faisons tous partie d’une conversation mondiale et tout est question de point de vue, de perspective à l’instant T. Cette vision globale de l’art n’a cessé de guider ASIA NOW dans son développement et fait plus que jamais sens.
Ce focus indien se prolonge-t-il hors les murs ?
Une installation de Remen Chopra, là aussi soutenue par Feroze Gujral de la Gujral Foundation, est présentée au musée Guimet, qui accueille depuis plusieurs années déjà une programmation sur l’art contemporain asiatique. Par ailleurs, le musée Cernuschi héberge une présentation d’œuvres vidéo d’artistes asiatiques sous le commissariat du conservateur Maël Bellec autour du rôle de l’homme dans l’Anthropocène.
Cette édition 2020 consacre également un focus à la scène de Taïpei, en particulier vidéo…
Elle est très dynamique. Cette année, la fondatrice de la Chi-Wen Gallery, Huang Chi-Wen, a eu l’idée d’étoffer l’offre sur les galeries taïwanaises avec les enseignes Double Square Gallery, Project Fulfill Art Space et Mind Set Art Center qui sont régulièrement à Art Basel Hong Kong. Mais elles n’avaient pas l’habitude de venir exposer à Paris. Cette plateforme met en particulier l’accent sur les questions sociétales et entre autres les problématiques des LGTB+, à travers des vidéos et des installations.
De nombreuses galeries de haut niveau, parisiennes et internationales, participent cette année à la foire, dont Almine Rech, Continua, Nathalie Obadia, Perrotin, Templon, Georges-Philippe & Nathalie Vallois… Est-ce le signe qu’ASIA NOW a su se faire une place respectée dans le paysage international des foires ?
Oui, et cela montre aussi la part belle réservée par certaines des plus grandes galeries internationales aux artistes asiatiques. Chaque année, plusieurs d’entre elles font des incursions à ASIA NOW. Cette fois, elles sont particulièrement nombreuses à exposer chez nous.
Quelle place la foire accorde-t-elle aux artistes émergents ?
Rien que pour la scène indienne, nous montrons à la fois des artistes établis, des stars comme Bharti Kher, Rina Banerjee ou Zarina avec des artistes plus jeunes comme Remen Choprah. Mélanger du très jeune, des « rising stars » et des superstars, c’est sans doute cela qui fait la force d’une foire qui n’en est qu’à sa 6e édition mais a réussi à trouver sa place. Mettre en lumière l’émergence en regard des talents plus confirmés est une façon de les soutenir et d’inciter les collectionneurs à s’y intéresser, à regarder vers l’Asie, que ce soit pour commencer une collection ou les faire entrer dans une collection déjà importante. La qualité et la réputation des galeries peuvent d’ailleurs inciter les collectionneurs à regarder certains artistes émergents en les validant. Des collections très importantes qui se construisent montrent que ce dialogue commence à porter ses fruits. ASIA NOW s’affirme comme une fenêtre durable et fidèle pour défendre des scènes diverses qui, ensemble, composent l’Asie.