Les musées nationaux du Royaume-Uni doivent faire face à leur plus grand défi depuis la Seconde Guerre mondiale. Confrontés à des problèmes financiers liés à leurs pertes de revenus, ils se préparent actuellement à leur déconfinement et aux nouveaux défis pour l’avenir. Maria Balshaw, directrice de la Tate, évoque la réouverture de ses musées.
Quand allez-vous rouvrir la Tate Modern et la Tate Britain à Londres ?
Nous prévoyons de rouvrir début août. Mais si le taux de contamination au coronavirus augmente, nous devrons nécessairement nous adapter.
NOUS PRÉVOYONS D’ACCUEILLIR 30 % DU NOMBRE NORMAL DE NOS VISITEURS
Qui décidera de la réouverture, la Tate ou le Département du numérique, de la culture, des médias et des sports (DCMS) [le ministère britannique de la Culture] ?
Le DCMS ne nous a pas forcés à fermer, ni ne nous ordonnera de rouvrir. Mais nous travaillons en étroite collaboration avec lui. Nous agissons également conformément aux directives du gouvernement, de sorte que les musées puissent potentiellement rouvrir à la troisième étape du déconfinement [au Royaume-Uni], c’est-à-dire après le 4 juillet.
D’autres musées nationaux rouvriront-ils en même temps que la Tate ?
Non. Chaque musée est dans une situation différente. Nous coordonnons nos calendriers et nous estimons tous qu’il serait imprudent pour tout le monde de rouvrir le même jour, en partie parce que nous dépendons d’un réseau de transports en commun qui ne fonctionnera pas à pleine capacité. Les réouvertures seront probablement étalées de la mi-juillet à la fin août.
Quel pourcentage de votre fréquentation antérieure attendez-vous ?
Nous travaillons pour garantir la sécurité des personnes et prévoyons d’accueillir 30 % du nombre normal de nos visiteurs. Nous sommes arrivés à cette conclusion pour deux raisons. Ce pourcentage représente le nombre de visiteurs que nous pouvons accueillir en toute sécurité, avec une distanciation sociale de deux mètres. Nous considérons également qu’il s’agit d’une estimation raisonnable face à la probable affluence. Mais je pense que la demande pourrait être plus importante, car pendant la fermeture, nous avons pu constater, sur les réseaux sociaux et sur notre site Internet proposant du contenu numérique, un enthousiasme et un amour incroyables pour nos musées et ce que nous y exposons.
Proposerez-vous de réserver des créneaux horaires depuis Internet ?
Nous examinons les différentes options, nous ne savons pas encore.
L’ouverture du musée aura-t-elle un coût plus élevé qu’auparavant et faudra-t-il plus de personnel ?
Nous ne le prévoyons pas. Il en coûtera autant pour ouvrir à 30 % qu’à 100 %. Mettre davantage de gardiens dans les salles n’est pas très utile lorsque les gens ont besoin de garder leur distance les uns avec les autres. Les employés de la Tate feront probablement différentes choses, mais l’ajout d’un personnel supplémentaire ne serait pas utile.
LES EXPOSITIONS SERONT PROLONGÉES ET ORGANISÉES SUR UNE TEMPORALITÉ BEAUCOUP PLUS LONGUE
La plupart du budget de la Tate provient de ressources propres. Si le nombre de visiteurs tombe à 30 %, vous pourriez probablement perdre plus de la moitié de vos revenus. Comment allez-vous faire face à cet énorme trou dans vos finances ?
La réponse est que nous y parviendrons. Nous cherchons à réaliser des économies partout où c’est possible. Les expositions seront prolongées et organisées sur une temporalité beaucoup plus longue. Cela signifie non seulement que les gens auront le temps de les voir, mais cela répartira également les coûts sur plusieurs exercices. Tout comme l’ensemble du secteur culturel, nous serons confrontés à un défi financier très important. Nous ne connaîtrons l’ampleur de la situation qu’après notre réouverture, et la situation change chaque semaine.
Espérez-vous obtenir davantage de soutien financier du gouvernement britannique ?
Le gouvernement procédera à l’examen du budget annuel à l’automne et nous devrons défendre notre cause. Pendant le confinement, une attention renouvelée a été accordée à l’importance de la créativité des gens. Les arts et la culture sont essentiels à notre bien-être social. Le DCMS fera valoir cet argument et j’espère que le gouvernement le reconnaîtra également. Nous avons un secteur muséal extraordinaire et couronné de succès, de même que notre secteur culturel au sens large. C’est quelque chose qui doit être protégé.