En quoi consiste l’exposition phare de cette édition, consacrée au Mur de Berlin ?
En me promenant en Amérique du Nord, en Nouvelle-Écosse, j’ai trouvé un morceau du Mur dans un petit village de pêcheurs. C’était impressionnant. À mon retour de vacances, j’ai effectué des recherches pour savoir si d’autres fragments étaient encore disponibles. J’ai découvert qu’une société d’Allemagne de l’Ouest en avait acheté en 1989, après le démontage anarchique de cette frontière, pour le réemployer de façon utilitaire. Plus tard, après la fermeture de cette entreprise, les pièces ont été récupérées par des artistes qui se les sont appropriées, puis les ont mises en circulation dans le monde entier pour dire : « Plus jamais ça ! » Ces pièces comportent ainsi à la fois des graffitis d’origine et postérieurs à la chute. Anniversaire du Mur oblige, nous montrons cinq morceaux achetés par la Brafa, devant l’entrée de la foire, car chacun pèse 3,6 tonnes ! Ils seront vendus aux enchères, avec une mise de départ de 15 000 euros pièce, au bénéfice de différents projets caritatifs, notamment médicaux ou humanitaires.
Dans toutes les foires, y compris les Salons d’antiquités, les arts modernes, de l’après-guerre et contemporain gagnent du terrain. La Brafa semble préserver une place importante aux domaines plus traditionnels…
C’est un petit combat à mener. Nous tenons à garder cet équilibre, cet éclectisme. Ce qui est difficile, car, pour dix demandes de galeries d’art du XXe siècle, nous n’en recevons qu’une ou deux en art ancien. Nous devons donc être un peu plus actifs pour rechercher ces dernières. C’est un challenge. L’antiquité classique, archéologique, se mélange relativement facilement avec l’art moderne, tandis que le mobilier ou les arts décoratifs classiques sont plus délicats à marier. Près de 10% de nos exposants sont spécialisés en archéologie, environ autant dans les arts premiers. Quand ils sont présentés à la façon d’un cabinet d’amateur, les arts décoratifs ont une bonne réception à la Foire, car toutes les époques sont mêlées, y compris l’antiquité classique.
Les problèmes de faux, mais également de provenance, n’ont jamais été aussi présents sur le marché de l’art. Or, les visiteurs ont besoin d’être en confiance pour acheter. Comment les prévenez-vous ?
Un galeriste m’a expliqué que, jadis, il était possible d’acquérir des antiquités gréco-romaines au sein même de la boutique du musée du Caire, qui vendait des pièces authentiques – des oushebtis ou des morceaux de bas-reliefs. C’est impensable aujourd’hui ! Il faut être prudent, attentif pour tout baliser, ce qui nécessite de rassembler une tonne de documents pour chaque objet. À la Brafa, l’Art Loss Register effectue une visite de contrôle : pendant deux jours, une centaine d’experts vérifient chaque stand, s’attachant entre autres aux provenances. Notre Foire a été la première dans le monde à faire venir un laboratoire, qui peut procéder à des radios, voire à des analyses de pigments. Nous avons rencontré un souci à propos d’un tableau cubiste il y a un an ou deux, que nous avons fait retirer, car il comportait du blanc de titane, un pigment qui n’existait pas à l’époque. Le marché, et c’est positif, évolue vers toujours plus de professionnalisme.