Le retour de l’Armory Show au Javits Center à partir d’aujourd’hui, 6 septembre (jusqu’au 8 septembre), coïncide avec plusieurs évolutions importantes pour la foire. Outre le fait qu’il s’agit de sa première occurrence entièrement sous la marque Frieze (l’édition de l’année dernière était bouclée avant que la société britannique de médias et d’événements ne la rachète en juillet 2023), la plus grande foire d’art de la ville de New York célèbre également son 30e anniversaire et sa première édition avec sa nouvelle directrice, Kyla McMillan, à la barre.
Les multiples occasions spéciales de cette année surviennent à un « moment d’évaluation », selon Kyla McMillan. La foire donne le coup d’envoi de la saison artistique automnale de la ville, lorsque « l’incroyable diversité de la communauté artistique offre tant de possibilités de refléter le paysage culturel plus large de New York, qui comprend également la mode, la musique, le design et l’architecture », dit-elle.
Cette diversité se reflète également dans les 240 galeries participantes. L’Armory Show a longtemps été considérée comme une foire régionale avec une sélection d’enseignes essentiellement nationales. Aujourd’hui, sa liste d’exposants est nettement plus jeune et plus internationale, peut-être grâce aux relations européennes et asiatiques facilitées par ses nouveaux propriétaires.
Nouveaux et anciens visages
Environ 60 % des galeries participantes sont des fidèles de l’année dernière, notamment Dastan Gallery de Téhéran, Galeria Raquel Arnaud de São Paulo et Jessica Silverman de San Francisco. Comme toujours, le contingent new-yorkais est important, avec 303 Gallery, Kasmin, Sean Kelly et James Cohan, entre autres participants réguliers.
L’édition de cette année compte au moins 55 nouveaux exposants et environ 25 galeries qui reviennent après une interruption. Parmi les nouveaux venus figurent Corbett vs Dempsey de Chicago, la galerie indienne Experimenter et la Gallery Baton de Séoul, où la foire coréenne de Frieze tient sa 3e édition en même temps. Parmi les galeries qui font leur retour, citons Bank de Shanghai, Pippy Houldsworth Gallery de Londres, Proyectos Monclova de Mexico, Rodolphe Janssen de Bruxelles et Marianne Boesky, pilier de Chelsea.
Robyn Farrell, directrice du célèbre espace new-yorkaise à but non lucratif The Kitchen, a organisé la section Focus, qui propose des stands d’un ou deux artistes et reprend l’esprit de la Gramercy International Art Fair, qui avait été lancée en 1994. Les 32 galeries du secteur comprennent un stand partagé par Corbett vs Dempsey et la galerie Fierman de Chinatown, qui présente les dessins de Jimmy Wright sur le New York homosexuel. La galerie Kapp Kapp de Tribeca consacre son stand aux peintures sur verre et aux sculptures suspendues de l’artiste multidisciplinaire Louis Osmosis.
Maintenir les liens régionaux
Christine Messineo, directrice de la foire Frieze pour les Amériques, souligne le lien entre le salon et les marchés des villes plus petites. « Il existe des scènes florissantes en dehors des côtes, notamment dans des villes comme Philadelphie, Portland ou Baltimore, qui deviennent de plus en plus attrayantes pour les artistes », explique-t-elle. « Un collectionneur peut voir ici la Bockley Gallery et Dreamsong, toutes deux de Minneapolis, ou des galeries de Toronto, Albuquerque ou Guadalajara, et il peut se faire une idée de ce qui se passe dans toute la région », ajoute-t-elle.
Pour la quatrième édition de la foire au Javits Center, le plan a été revu afin de présenter les œuvres « de manière plus claire », explique Christine Messineo. La principale nouveauté est la suppression des structures porteuses entre certains stands et l’adoption d’un format cohérent à trois murs. Le plan du salon continuera à faire la part belle aux œuvres de grande taille de la section Platform, organisée cette année par l’ancienne conservatrice en chef du Brooklyn Museum, Eugenie Tsai. Ce secteur comprend la série Chimeras de Sanford Biggers, qui mêle des sculptures occidentales traditionnelles à des masques africains, et les formes colorées au crochet suspendues de l’artiste portugaise Joana Vasconcelos.
Des premières tape-à-l’œil et des galeries en pleine ascension
Pour ses débuts à l’Armory, la Hannah Traore Gallery a opté pour une exposition personnelle dans la section Presents, réservée aux galeries ouvertes au cours des dix dernières années. Elle y expose la photographe mexicaine d’origine colombienne Camila Falquez, dont le travail porte sur la protection gouvernementale des personnes transgenres et non binaires en Colombie. La fondatrice de la galerie du Lower East Side croit en la promesse de visibilité de la foire. « Même en tant que visiteur, j’ai pu rencontrer des collectionneurs et des amateurs d’art du monde entier » à l’Armory Show, dit-elle.
La galerie Bradley Ertaskiran, basée à Montréal, a bénéficié d’un coup de pouce décisif en exposant dans le secteur Presents et a intégré le secteur principal de la foire cette année. « Le passage dans la section principale démontre la maturation du marché de la galerie et de sa base de collectionneurs », se félicite Antoine Ertaskiran, cofondateur de la galerie. Cette évolution « accroît notre notoriété et nous permet de nous engager plus directement auprès des collectionneurs locaux, des conservateurs et des amateurs d’art qui sont profondément investis dans la scène artistique régionale », ajoute-t-il. Le stand collectif de la galerie présente une série d’artistes basés au Canada, notamment des peintures figuratives séduisantes de Margaux Williamson, Veronika Pausova et Janet Werner, ainsi qu’une abstraction géométrique de Shaan Syed et une sculpture d’Azza El Siddique.
Un point d’entrée essentiel
Pour nombre d’exposants, l’Armory Show fonctionne comme un point d’entrée clé dans la communauté des collectionneurs et des institutions de New York. Cet aspect a constitué la principale motivation du Fine Arts Work Center – une organisation à but non lucratif qui organise des expositions et des résidences à Provincetown, dans le Massachusetts – d’y faire sa première incursion dans le domaine commercial. « Nous y voyons un moyen idéal d’atteindre les collectionneurs et de comprendre l’écosystème artistique », explique Sharon Polli, directrice du centre, cofondé par un groupe d’artistes comprenant Robert Motherwell et Jack Tworkov. Le stand du centre présente une version de style salon de sa dernière exposition collective d’été, organisée par Matt Bollinger, ancien membre du centre, et comprenant des œuvres de Lisa Yuskavage, Heidi Hahn, Angela Dufresne et d’autres anciens étudiants.
Bien qu’elles soient situées à une dizaine de rues au sud du Javits Center, les fondatrices de la Berry Campbell Gallery de Chelsea, Christine Berry et Martha Campbell, ont choisi d’exposer à l’Armory Show parce qu’elles le considèrent comme le « héros local classique des foires d’art ». Elles estiment que la mission de leur galerie, qui consiste à défendre le travail d’artistes ayant été négligés en raison de leur âge, de leur sexe ou de leur race, correspond au profil des collectionneurs de la foire. « En tant que femmes chefs d’entreprise et historiennes de l’art chargées de défendre les femmes, nous pensons que la colonne vertébrale de la foire nous permet de rester cohérentes avec notre programmation », explique le duo.
Les organisateurs de l’Armory Show restent optimistes quant à l’importance de la foire et à la place de New York en tant que capitale mondiale du marché de l’art. Christine Messineo cite l’évolution du comportement des collectionneurs lors des autres foires américaines de Frieze cette année – Frieze Los Angeles en février-mars et Frieze New York en mai – comme preuve que le modèle de la foire remplit toujours une fonction vitale. « Le fait que davantage de ventes aient eu lieu sur place plutôt qu’en avant-première cette année montre que les gens choisissent d’abord de passer du temps devant l’œuvre », explique-t-elle.
Kyla McMillan ajoute que son expérience en tant qu’exposante à l’Armory Show (avec la galerie David Zwirner, dont elle était auparavant directrice) lui permet de comprendre les attentes des collectionneurs et ce dont les marchands ont besoin. « Nous sommes en mesure de faciliter les relations avec le marché pour les galeries dans un large éventail de domaines, explique-t-elle. Le fait de savoir ce qu’est un exposant me permet de construire une plateforme globale avec laquelle il est possible de se connecter. »
The Armory Show, du 6 au 8 septembre 2024 (avant-première VIP le 5 septembre), Javits Center, New York, États-Unis.