C’est un projet singulier et mutualiste qui fait étape en France en ce début 2024 : « no place », qui tire son nom de l’univers décrit par l’écrivain et philosophe Thomas More, se veut un événement utopique. Un « geste radical d’imagination pour accomplir la réalisation d’un espace dans lequel l’expérience de l’art et le potentiel commercial s’équilibrent l’un l’autre », résument les organisateurs. Cette année, pour sa 4e édition, le projet se déploie sous la forme d’un « world tour », dont la première étape est la France.
Plateforme de collaboration entre galeries (NF/Nieves Fernandez de Madrid, Nueveochenta de Bogotá, Arróniz de Mexico, et Sturm & Schober de Vienne), no place s’installe jusqu’au 24 février 2024 à la galerie Sator, à Romainville. « Nous rejoignons la manifestation cette année », confie Vincent Sator. Le principe ? « La galerie accueillante confie le commissariat à l’un de ses artistes, qui sélectionne un artiste de la galerie hôte, et un créateur par enseigne invitée, le tout sans exposer son propre travail », poursuit-il. À Komunuma, où est installée la galerie Sator, l’artiste Raphaël Denis a ainsi sélectionné pour l’exposition « Fenestria » le travail de Tamara Arroyo (NF Galeria), Hugo Deverchère (Sator), Lieven Hendriks (Michael Sturm), José Luis Landet (Arróniz) et Jaime Tarazona (Nueveochenta).
Autre spécificité du projet, et non des moindres : « on partage de façon équitable les dépenses tels que les transports et la production, mais aussi, ensuite, les recettes », précise Vincent Sator. Les 50 % du prix de vente de l’œuvre habituellement dévolus à la galerie sont ici répartis à parts égales entre les cinq enseignes participantes… soit 10 % chacune. Une pièce de Lieven Hendriks apportée par la galerie Michael Sturm vient de se vendre, et le produit sera distribué selon cette règle égalitariste. « Ainsi, c’est dans l’intérêt de tout le monde que des ventes se fassent », observe Vincent Sator.
L’intérêt de ce projet « est dans le long terme », ajoute-t-il. Les galeristes pourront bénéficier d’un réseau international sans les coûts d’un événement plus lourd comme une foire : les enseignes latino-américaines peuvent se frotter au marché européen, et vice versa. Tout en étant assurées que les artistes seront « cornaqués par un marchand investi dans l’événement et exposés à un réseau local déjà installé », note Vincent Sator.
Les prochaines destinations du « no place tour » seront Madrid où la galerie NF/Nieves Fernandez accueillera une sélection opérée par Pipo Hernández Rivero ; Bogotá, où s’ouvrira le 13 juin un accrochage de groupe à la galerie Nueveochenta curaté par Fernando Uhia. Puis, ce sera au tour de Mexico le 6 juillet à la galerie Arróniz avec, pour commissaire, Mauro Giaconi. Enfin, Vienne fermera la marche, avec Sturm & Schober qui confiera l’exposition à Thomas Gänszler, à partir du 13 septembre. Une façon de semer des graines sur deux continents majeurs…