Célébrant son 15e anniversaire cette semaine, l’India Art Fair (IAF) à New Delhi, première foire d’art contemporain lancée en Asie du Sud, revient au NSIC Exhibition Grounds du 1er au 4 février 2024. Cette édition sera sa plus importante à ce jour, avec 72 galeries. « Le marché de l’art indien continue de se développer parallèlement à l’expansion de l’économie. Et nous nous développons avec lui », nous a déclaré la directrice de la foire, Jaya Asokan.
Le contexte était bien différent au lancement du salon en 2008. Le marché de l’art indien était au creux de la vague après avoir connu une période de boom spectaculaire pendant six ans. La remontée a été lente, mais les chiffres du second marché dépassent désormais les sommets atteints à la fin des années 2000. De plus, un nombre croissant d’institutions privées, de fondations et de biennales ont favorisé l’émergence d’un écosystème artistique plus durable.
L’IAF est l’une de ces institutions qui a joué un rôle vital de soutien au marché à un moment de fragilité, tout en promouvant les organisations à but non lucratif de la région, souligne Jaya Asokan. Ces efforts ont porté leurs fruits. « Nous avons franchi un cap, affirme-t-elle. Nous sommes peut-être plus petits que d’autres marchés mondiaux, mais nous ne sommes plus émergents. »
Le signe le plus évident de cette arrivée à maturité est peut-être l’intensification de la concurrence. Pendant 14 ans, l’IAF a été la seule foire importante en Asie du Sud. La donne a changé l’année dernière avec le lancement d’Art Mumbai en novembre 2023, organisée par les dirigeants de la plus grande maison de ventes aux enchères d’Inde, Saffronart. La foire de Mumbai est modeste en comparaison de celle de New Dehli, mais elle a de fortes ambitions de croissance (la première édition de l’IAF comptait moins de galeries que celle d’Art Mumbai). La présence de deux foires majeures dans le pays pose question : le marché indien est-il assez important pour héberger deux événements d’importance ?
« Nous félicitons Art Mumbai pour la réussite de sa première édition et nous saluons l’expansion de cet écosystème – que nous avons contribué à mettre en place, a déclaré Jaya Asokan. Bien sûr, nous sommes conscients du point de saturation des événements comme les nôtres. Les collectionneurs ne voudront peut-être pas aller aux deux – il est naturel de faire un choix. Ce n’est pas une mauvaise chose. »
Dans un marché en expansion, l’innovation est essentielle, et cette année, l’IAF présente une nouvelle section consacrée au design – qui, selon Jaya Asokan, était prévue avant le lancement d’Art Mumbai. « Le design n’a pas été exposé correctement dans ce pays, explique-t-elle. Nous voulons le montrer non pas comme un produit de masse, mais comme un objet de collection. » Parmi les studios de design présents dans la nouvelle section, figurent Studio Renn (Mumbai) et Vikram Goyal (New Delhi).
Cette nouvelle section est également un clin d’œil à l’une des principales forces motrices du segment intermédiaire du marché de l’art en Inde : les architectes d’intérieur qui achètent des œuvres pour le compte de leurs clients. Cette base de collectionneurs est l’une des plus fiables du secteur. De nombreuses villes indiennes connaissant un boom immobilier, la demande en œuvres d’art pour « décorer » les nouveaux logements ne cesse de croître.
« Chaque année, à la foire, beaucoup de nos galeries exposantes font des affaires avec des décorateurs d’intérieur et des architectes », se félicite Jaya Asokan. Avec ce groupe d’acheteurs bien établi, elle espère que tous les secteurs bénéficieront de la dynamique entraînée par le design en « encourageant la pollinisation croisée entre les disciplines ». Les collectionneurs d’Asie du Sud y sont « particulièrement réceptifs » en raison des longues et diverses traditions d’artisanat et de métiers d’art.
L’innovation est peut-être la clé pour rester leader. Pour développer l’ensemble du marché, l’IAF peut s’appuyer sur les atouts historiques de la région.
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Indian Art Fair, du 1er au 4 février 2024, NSIC Exhibition Grounds, Okhla, New Delhi, Inde
La France renforce sa présence en Inde avec des résidences d’artistes
« Nous avons inscrit l’Inde sur la carte des résidences d’artistes que la France a développée dans le monde avec la création en 2023 de la Villa Swagatam qui permet à des artistes, designers, écrivains de nos pays de s’immerger dans nos cultures respectives », a déclaré le président Emmanuel Macron le 26 janvier 2024 lors de sa visite officielle en Inde. Et de poursuivre : « Et j’ai pu hier à Jaipur le constater ô combien avec plusieurs artistes et avec les responsables du programme ».
Portée par l’Institut français d’Inde, la Villa Swagatam (« Bienvenue » en sanskrit) est un nouveau réseau de 16 résidences réparties dans tout le pays. Ce programme rejoint ainsi la liste des résidences françaises dans le monde entier : la Villa Albertine aux États-Unis, la Villa Kujoyama au Japon, la Casa de Velázquez en Espagne, le Nouveau Grand Tour et la Villa Médicis en Italie. L’objectif est clair : « créer une communauté de créateurs français qui, grâce à des séjours d’immersion culturelle de plusieurs semaines, s’inspirent des savoir-faire et de l’histoire du pays et s’engagent dans des coopérations à long terme avec l’Inde ».
La première édition accueille 17 écrivains, auteurs de romans graphiques, designers et artistes visuels… Parmi les lauréats figurent les plasticiennes July Ancel et Deborah Fisher, l’artiste multimédia Elsa Mroziewicz, la performeuse Pauline Lavogez ou la designer VSB (Victoire de Brantes).