Travaillant pour la présidence de la République italienne depuis 2019, Renata Cristina Mazzantini a conçu le projet « Quirinale contemporaneo », consistant à présenter des œuvres d’art et de design contemporains dans les somptueuses salles anciennes, transformant la résidence du président italien à Rome. Grâce à son succès, le « Quirinale contemporaneo » est devenu un modèle que d’autres institutions. Renata Cristina Mazzantini est actuellement commissaires de plusieurs projets sur le même modèle, notamment : « Reggia Contemporanea » pour le Consorzio Villa Reale e Parco de Monza, « Villa Firenze Contemporanea » pour l’ambassade d’Italie aux États-Unis, « ARSxIUS » pour la Scuola Superiore della Magistratura, « Mit Contemporaneo » pour le ministère des Infrastructures et des Transports, « Contemporanei a Palazzo Borromeo » pour l’ambassade d’Italie auprès du Saint-Siège.
En tant qu’architecte, elle a dirigé la restauration de complexes architecturaux à Rome tels que Santa Maria sopra Minerva, Santa Maria in Campo Marzio et le Palais Montecitorio. Elle a aussi été commissaire de l’exposition « Georgia O’Keeffe » à la Fondazione Roma Museo et celle du « Satyre dansant » aux musées du Capitole. Avec Paolo Portoghesi, elle a publié le livre Palazzo Montecitorio (Mondadori Electa), et a écrit des essais pour Patrimoni storico-artistici e paesaggi culturali (Lumi Edizioni) et Natura e cultura nel paesaggio italiano (Edizioni Unicopli). Aux éditions Treccani, elle a récemment publié Dentro Roma, avec des photographies de Massimo Listri. Entretien.
Allez-vous revoir l’accrochage conçu par la précédente directrice, Cristiana Collu, qui n’est pas chronologique et propose un dialogue au sein des collections ?
Ce parcours a été conçu il y a huit ans et doit être renouvelé. Je crois fermement à la valeur didactique des musées et je voudrais proposer au grand public une vision plus immédiate de l’évolution de l’art au cours des deux derniers siècles. Plutôt qu’un accrochage chronologique, j’aimerais suivre un principe monographique, avec des approches approfondies de grandes personnalités et la présentation des mouvements majeurs. Il est possible que l’ensemble soit également présenté selon une perspective pluridisciplinaire, afin de restituer le contexte culturel dans lequel ils s’inscrivent. J’aimerais que les œuvres aient un impact plus immédiat sur le grand public, qu’elles touchent son cœur et son esprit.
En quittant le musée, Cristiana Collu avait déclaré : « Le musée jouit d’une excellente réputation et d’une bonne vitalité, alors qu’en 2015, comme nous le savons, elle était en piteux état. Le traitement a été efficace et la récupération rapide. Celui qui me succédera disposera d’une base administrative et d’une gestion solides. Il sautera dans une voiture en marche avec le plein, dans un bateau de croisière naviguant en eaux sûres et dans un vaisseau spatial (l’aile Cosenza) sur la rampe de lancement. » Vous sentez vous prête à vous envoler ?
Oui, Cristiana Collu a raison, elle a très bien travaillé. Maintenant, je vais avoir la chance de disposer d’un matériel moderne et efficace, mais je vais devoir perfectionner le logiciel. Et pour moi, cela signifie de définir une marque pour le musée, quelque chose qui le rende facilement reconnaissable, en identifiant trois à quatre œuvres emblématiques de la collection, et en en faisant le symbole de l’institution qui défend l’art national [italien] des deux derniers siècles. Le musée est aujourd’hui moderne et atteint sa maturité, son image peut donc être redéfinie et diffusée. Son identité peut ainsi devenir beaucoup plus forte.
Vous avez intitulé l’un de vos essais « Les raisons de la légèreté » et une exposition « La vie silencieuse des choses » : s’agit-il de vos principes directeurs ?
Oui, mais pas seulement. Il y a aussi un troisième facteur, la légèreté. La légèreté est la voie, le silence est l’essence de l’art, mais ensuite il y a le contact avec le monde, et c’est la lumière. Je dirais donc que mon principe général sera de mettre en lumière une magnifique collection, d’éclairer sa légèreté dans le silence.
Existe-t-il une formule pour une présentation muséale parfaite ?
Le concept d’une exposition fonctionne si elle atteint le public, en le mettant dans les meilleures conditions pour entrer en contact avec l’œuvre d’art. La scénographie de l’exposition est une mise en scène qui doit également révéler les significations sous-jacentes de l’œuvre et doit être capable de créer des émotions et des souvenirs.
Avez-vous déjà des projets d’exposition ?
Je peux vous dire que je prépare la grande exposition d’octobre sur le Futurisme, dont je ne sais encore absolument rien.
Allez-vous poursuivre votre politique d’acquisition d’archives d’artistes et de chercheurs ?
Bien sûr. Ce ne sera pas la voie dominante, mais c’est une ligne à laquelle je crois.
Cristiana Collu a beaucoup travaillé sur la certification énergétique du musée.
Ce sera aussi l’une de mes priorités, j’ai un doctorat précisément en design environnemental.
Allez-vous assurer vous-même le commissariat des expositions, comme c’est de plus en plus souvent le cas pour les directeurs de musée, ou ferez-vous appel à des personnalités extérieures ?
Je ferai appel à des personnalités avec lesquelles j’ai déjà collaboré et au personnel interne du musée, sauf pour les projets culturels qui me tiennent à cœur, auxquels je pourrais me consacrer personnellement.
Des expositions d’architecture, par exemple ?
Non seulement cela, mais peut-être aussi le design. Je crois beaucoup à la nature pluridisciplinaire de l’offre muséale et j’aime le terme de « créativité contemporaine ».
Qu’avez-vous appris de l’expérience de « Quirinale contemporaneo » ?
Que l’art contemporain n’a pas besoin du « white cube » et qu’il y a beaucoup plus de continuité entre l’ancien et le moderne qu’on ne le croit généralement. Les avant-gardes elles-mêmes, toujours lues comme des phénomènes de ruptures et d’oppositions, tissent des fils rouges secrets avec le passé.
Votre maître l’architecte Paolo Portoghesi a dit que le bâtiment du musée de la Valle Giulia, conçu par Cesare Bazzani, est un chef-d’œuvre. Êtes-vous d’accord avec cette affirmation ?
Tout à fait. La séquence des pièces est également très fonctionnelle, et la présence des puits de lumière est précieuse. En tant qu’architecte, je dirais « un excellent réceptacle pour un musée ».
Quel est l’enseignement le plus précieux de Paolo Portoghesi ?
L’importance de l’harmonie de l’architecture, y compris avec la nature et le paysage.
Et l’amour de Rome, non ?
Je suis très amoureuse de Rome, c’est une ville d’une beauté bouleversante et omniprésente, faite d’histoire, mais aussi de couleurs, de lumière, de climat, de paysage. Il m’est arrivé de vivre pendant des longues périodes loin de Rome. Elle m’a beaucoup manqué. Rome est mon élément.
Galleria Nazionale d'Arte Moderna e Contemporanea, Viale delle Belle Arti 131, Rome, Italie