Ales Pouchkine, artiste anticonformiste, illustrateur et activiste civique qui avait déversé lors d’une célèbre performance du fumier devant les bureaux du président bélarusse Alexandre Loukachenko, est décédé dans un hôpital pénitentiaire dans des « circonstances obscures », a annoncé sa femme, Ianina Demuch, dans un message posté sur Facebook le 11 juillet. Il avait 57 ans.
Pouchkine était détenu dans une prison connue pour ses conditions brutales à Hrodna, dans l’ouest du Bélarus, après avoir été condamné à cinq ans de prison en 2022 pour avoir représenté un combattant de la guérilla antisoviétique d’après-guerre avec une mitrailleuse. Le pouvoir avait voulu voir dans ce geste, considéré comme un crime, une « action délibérée visant à réhabiliter et à justifier le nazisme ».
Le 12 juillet, Most, un site d’information de l’opposition bélarusse basé en Pologne, a rapporté que Pouchkine était mort d’une défaillance de multiples organes après que la prison n’eut pas soigné à temps son ulcère perforé. La page Facebook de l’artiste a été inondée d’hommages à son œuvre et à son courage.
Ales Pouchkine comptait parmi les nombreux artistes bélarusses victimes de la vague d’oppression qui a suivi les manifestations de 2020 contestant la victoire de Loukachenko à l’élection présidentielle contre Svetlana Tikhanovskaïa, l’épouse d’un blogueur de l’opposition emprisonné. Plus récemment, Alexandre Loukachenko s’est montré un allié zélé de Vladimir Poutine dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine. Les actions brutales du président bélarusse contre les militants de l’opposition, y compris les artistes, ont préfiguré la répression du Kremlin contre la liberté d’expression en Russie.
Le 11 juillet, après l’annonce de la mort d’Ales Pouchkine, Svetlana Tikhanovskaïa a tweeté qu’il avait « utilisé son œuvre pour lutter pour la liberté » et bâtir un Bélarus libéré de la tyrannie. Il représentait une menace pour les dirigeants car « les dictateurs craignent les artistes » qui « ont le pouvoir d’exprimer des pensées et des idées qui remettent en cause les mensonges du régime » et « tendent un miroir au monde, un miroir que les tyrans redoutent de regarder ».
Ales Pouchkine, qui a favorisé la renaissance de la culture bélarusse, a pressenti la direction que prenait le régime de Loukachenko en 1999, et y a répondu en déversant du fumier devant ses bureaux lors de sa performance intitulée Cadeau pour le président. Il était également connu comme illustrateur et restaurateur et a représenté un homme ressemblant à Loukachenko dans une scène du Jugement dernier qu’il a peinte pour une église de son village natal de Bobr.