Les ateliers des artistes du XIXe et XXe siècles ont cette atmosphère particulière de lieux qui ont fait naître des chefs-d’œuvre mais qui sont aujourd’hui plongé dans le silence. Ils témoignent de temps révolus tant dans leur architecture que dans leur aménagement, ce qui leur donne un charme indéniable. Ils permettent aussi de se replonger dans l’univers d’un peintre ou d’un sculpteur et de se confronter aux œuvres qui ont été conservées sur les lieux même qui les ont vues naître. Paris a la chance d’être riche en ces lieux insignes pour l’histoire de l’art. Parmi ceux-ci, la maison dans laquelle vécut et travailla Gustave Moreau, dans le 9e arrondissement, présente encore son magistral escalier en spirale datant du XIXe siècle. Plus au sud, dans le 14e arrondissement, la maison-atelier de Jean Lurçat est un exemple de l’architecture Art déco, elle qui fut construite en 1925 par le frère de l’artiste, l’architecte André Lurçat. L’atelier de Zadkine, situé tout près du jardin du Luxembourg, dans le 6e arrondissement, lieu de résidence et de travail du sculpteur d’origine russe et de sa femme peintre Valentine Prax, conserve un charme bucolique avec son petit jardin.
Le 15 mars 2023, c’est l’atelier d’Antoine Bourdelle qui rouvre au public dans le 15e arrondissement. Le lieu a subi une importante campagne de travaux pour renforcer sa structure qui présentait de nombreuses faiblesses. Les fondations ont été consolidées sur ce sol fragilisé par la présence de carrières. Une cage en profilés métalliques a été installée en remplacement de poteaux de bois. Un système de chauffage moderne est venu compléter le dispositif. Malgré ces lourdes interventions, le lieu a conservé son aspect originel, les fissures sur les murs sont même encore visibles. Le mobilier d’époque a été réinstallé, tout comme les œuvres de l’artiste ou de sa collection, un crucifix médiéval ayant même retrouvé la place qu’il occupait du temps du sculpteur. Ce chantier a permis aussi de revoir en profondeur l’aménagement du musée Bourdelle. Un café-restaurant – le Rhodia – a été aménagé au premier étage dans l’appartement qu’occupait la fille de l’artiste, Rhodia Bourdelle, et son mari, le décorateur Michel Dufet, qui dira : « Rodin est l’aboutissement d’une époque, Bourdelle le début d’une autre ». Pour s’en convaincre, il suffit de visiter le nouveau parcours des collections, dont le leitmotiv a été de « renouveler le regard sur Bourdelle ». Six salles permettent de contempler plus de cent dix sculptures, mais aussi quarante-cinq contretypes de photographies. Dans l’atelier de peinture très cosy avec ses murs bordeaux, est exposée une nouvelle acquisition, un Portrait d’Augustin Quercy réalisé au fusain et à la craie blanche sur papier en 1884. Le dispositif de médiation a aussi été entièrement revu, notamment dans la salle des techniques enrichie d’écrans interactifs. Enfin, pour cette inauguration, l’aile Portzamparc accueille une importante exposition du peintre et sculpteur contemporain Philippe Cognée (jusqu'au 16 juillet 2023) sous le titre « la peinture d’après », avec une présentation exceptionnelle du Catalogue de Bâle – plus d’un millier d’œuvres ! Un incroyable travail d’atelier.