Magritte superstar
Landau Fine Art (Meggen, Montréal)
Magritte fait certainement partie des artistes à avoir créé les compositions les plus insolites, fruit du surréalisme et de l’inconscient. La galerie Landau de Montréal présente cet incroyable tableau de l’artiste belge représentant un nuage retenu dans une coupe transparente, allusion au désir de l’artiste pour sa femme Georgette Berger. Le tableau a été exposé au musée Magritte à Bruxelles avant sa mise en vente à Maastricht. En 2017, il avait été cédé pour 16,2 millions d’euros chez Christie’s. La galerie n’hésite pas à en demander, six ans plus tard, le double : 33 millions d’euros, sans doute le plus gros prix de la foire.
Une tapisserie de Diane de Poitiers
Wildenstein & Co. Inc. (New York)
Cette tapisserie imposante fut commandée pour orner l’une des résidences de Diane de Poitiers au XVIe siècle, récemment ressuscitée par Isabelle Adjani, d’où une iconographie mettant en scène cette Diane chasseresse… « Dans un état magnifique », selon David Wildenstein, elle est restée entre les mains de cette famille depuis plus de cent ans, l’arrière-grand-père de Guy Wildenstein l’ayant acquise en 1919. Sur les dix tentures de commandées, la moitié a brûlé au cours d’une restauration. D’autres parties restantes se trouvent dans des musées, dont le Louvre. Le prix : 3,5 millions de dollars. Ne pas oublier de jeter un œil aux sculptures Le baiser donné et Le Baiser rendu, l’un par Jean-Antoine Houdon et l’autre par son élève Joseph-Charles Marin, fausse paire en vente pour la bagatelle de 4,5 millions de dollars.
Le Christ couronné par Manfredi
Benappi Fine Art
La peinture ancienne reste l’un des points forts de la Tefaf Maastricht. Ainsi, la galerie italienne Benappi Fine Art, « l’un des meilleurs marchands de tableaux anciens aujourd’hui » selon le conseiller Nicolas Joly, expose ce tableau de Bartolomeo Manfredi. Combinant l’insigne royal mais aussi un symbole de souffrances, la scène du Couronnement d’épines reprise ici fait partie des épisodes de la vie du Christ les plus illustrés par les maîtres anciens, tel Le Caravage, dont Manfredi fut l’un des grands disciples. Comptez 4 millions d’euros.
Une aiguière Rothschild
Galerie Kugel (Paris)
Difficile de dire quelle est la plus belle pièce du stand de la galerie Kugel tant les chefs-d’œuvre y sont nombreux, mis en valeur par une nouvelle scénographie sobre signée René Bouchara. Outre un splendide cabinet de pietra dura orné de plaques de jaspe, de lapis-lazuli et d’améthyste, rare travail vénitien, l’enseigne parisienne, spécialisée dans le « goût Rothschild » présente cette précieuse aiguière qui a précisément appartenu aux Rothschild au XIXe siècle. « L’orfèvrerie italienne est plutôt rare car beaucoup de pièces ont été fondues », explique Laura Kugel. Entre maniérisme et baroque, cette aiguière « acquise dernièrement dans une toute petite vente » est maintenant affichée à un prix « à sept chiffres ».
Diana de Rosa, la redécouverte
Galerie Porcini (Naples)
Alors que les musées, en particulier américains, mettent désormais l’accent sur les artistes femmes dans leurs recherches, la galerie Porcini consacre un focus à Diana de Rosa, contemporaine d’Artémia Gentileschi au XVIIe siècle, et disparue précocement à l’âge de 41 ans. Cette artiste a travaillé dans l’atelier de Massimo Stanzione, maître de l’école napolitaine baroque. Outre une délicate sainte Cécile chantant, « seule peinture signée connue de l’artiste », précise la galerie, qui en demande « moins de 250 000 euros », l’enseigne propose un deuxième tableau représentant Eliézer et Rébecca. La galerie napolitaine a misé sur une scénographie très soignée incluant une vidéo consacrée à l’artiste et son corpus dans les musées.
Frans Hals de retour
Adam Williams Fine Art (New York) & Åmell’s (Stockholm)
Déjà présenté plus timidement l’an passé par les galeries Adam Williams Fine Art & Åmell’s, ce tableau de Frans Hals revient sur leur stand mais cette fois mis en avant par un immense encadrement noir. Depuis, les doutes sur son attribution au maître flamand ont été levés par le musée Frans Hals de Haarlem. L’artiste représente ici un riche brasseur de cette ville des Pays-Bas. Prix en conséquence : 5,6 millions d’euros.
Un Murillo du roi de France Louis-Philippe
Colnaghi (Londres, New York, Madrid)
À la foire de Maastricht, il n’est pas rare de voir des œuvres importantes réapparaître sur le stand de galeries qui les déjà ont vendues jadis. Le Murillo accroché en majesté chez Colnaghi bat sans doute des records puisqu’il a été vendu par la galerie… dans les années 1850 ! Cette peinture, passée par la collection du roi de France Louis Philippe, « fait partie des derniers tableaux de ce calibre encore en mains privées, les autres étant dans des musées », commente la galerie. Prévoir un budget conséquent, dont peu de musées publics peuvent disposer : 12 millions d’euros.
Une commode de Marie-Antoinette
Galerie Perrin (Paris)
Impossible de rater le stand, tout de suite à droite en entrant dans la foire. Cette commode d’époque Transition fit partie des toutes premières pièces livrées pour Marie-Antoinette à Compiègne, avant qu’elle ne s’installe à Versailles. « Il s’agissait d’une paire à l’origine, son pendant a été offert à Versailles par Florence Gould, précise l’antiquaire Philippe Perrin. Mon père et Michel Meyer ont acquis cet exemplaire-ci pour 4,5 millions de francs en 1985 aux enchères à Saint-Germain-en-Laye, puis l’ont revendu à une collection monégasque ». La galerie l’a acheté chez Christie’s avant d’enlever son vernis opaque, fruit d’une mauvaise restauration. Une pièce de musée pour 4 millions d’euros.
Un Chagall hors normes
David Tunick, INC.
Réalisé en 1917, probablement peu après le retour de Marc Chagall à Vitebsk, dans l’actuelle Biélorussie, cet autoportrait fut ensuite offert par l’artiste à sa sœur, en 1922. Passant ensuite entre les mains de ses héritiers, il est acquis dans les années 1990 par un consortium d’acheteurs basés en Israël. TLa toile reste invendue en 1995 chez Sotheby’s, son authenticité étant alors mise en doute de façon malveillante dans la presse. Elle est ensuite cédée de gré à gré à un Américain, client de la galerie David Tunick. « Nous disposons de certificats réguliers du comité Chagall », confie le marchand. L’œuvre a été notamment présentée dans l’exposition « Marc Chagall et l’École de Paris » en 1997 au Petit Palais à Paris puis à Genève. Il a été également en prêt de longue durée à la Tate Modern à Londres entre 2005 et 2007. Pour cette œuvre exceptionnelle, le marchand n’hésite pas à demander 25 millions de dollars, proche du record de Chagall aux enchères, avec 28,4 millions de dollars obtenus par Les Amoureux en 2017 chez Sotheby’s.
L’ancien bureau d’Yves Saint Laurent
Maxime Flatry (Paris)
N'oubliez pas de vous rendre au premier étage, qui accueille le secteur « Showcase » de la foire, tremplin pour les jeunes enseignes. Il s’y trouve l’une des plus belles pièces de cette édition en arts décoratifs et design : l’ancien bureau d’Yves Saint Laurent qui ornait sa garçonnière moderne de l’avenue de Breteuil à Paris, aménagée par Jacques Grange, et dont l'atmosphère est ici évoquée. En chêne sablé, sensuel au toucher, il a été réalisé par Eyre de Lanux vers 1932, l’une des plus singulières créatrices modernistes, très rare sur le marché. Selon le marchand, il s’agirait de son seul bureau référencé. Acquis par le couple Pierre Bergé et Yves Saint Laurent en 1982, il est ici proposé avec son fauteuil pour une somme « à six chiffres ».
TEFAF, jusqu'au 19 mars 2023, MECC, Maastricht, Pays-Bas.