Par une annonce surprise le 28 octobre, Art Basel a annoncé que Marc Spiegler allait quitter son poste de directeur mondial d’Art Basel le mois prochain, après 15 ans à la tête du premier groupe de foires d’art au monde. Selon un communiqué de la société, Marc Spiegler restera au cours des six prochains mois conseiller du holding d’Art Basel, MCH Group, avant de partir pour « explorer la prochaine étape de sa carrière au sein du monde de l’art ».
Il est remplacé par un visage familier : Noah Horowitz, directeur Amériques d’Art Basel de 2015 à juillet 2021. Ce dernier réintégrera la société en tant que directeur général le 7 novembre. Noah Horowitz avait quitté Art Basel pour rejoindre Sotheby’s et un poste nouvellement créé pour lui, axé sur les ventes privées et les services aux galeries. Son départ soudain à l’époque avait été interprété par beaucoup comme une chance pour les maisons de vente aux enchères à un moment où les foires d’art étaient affaiblies par la pandémie.
Mais ce passage a été de courte durée. « J’ai vécu des moments formidables chez Sotheby’s et j’y ai vu une carrière longue et fructueuse, mais diriger Art Basel est une opportunité unique », a déclaré Noah Horowitz à The Art Newspaper. Malgré cette brève expérience, il affirme que travailler sur l’autre face du marché lui a ouvert les yeux. Au sein de la maison de ventes aux enchères, il a lancé un dispositif réservé au premier marché pour vendre des œuvres provenant directement des ateliers des artistes, et a également travaillé dans les services des prêts, aidant les galeries à accéder à des prêts garantis par des œuvres d’art.
Cette expérience s’avérera déterminante pour le prochain chapitre d’Art Basel, affirme Noah Horowitz, ajoutant qu’il espère maintenant adapter certains de ces projets « dans une direction différente » au sein de la société organisatrice de foires. Son retour intervient alors que « le glissement dans le secteur entre les pratiques nouvelles et anciennes est très rapide », dit-il. Le changement de son titre, passant de « directeur mondial » à « directeur général », en est la preuve, car il montre que « le groupe continue d’évoluer et nécessite désormais une personne aux compétences différentes ».
Sa nomination étant toute récente, Noah Horowitz déclare ne pas être en mesure de détailler les changements qu’il prévoit pour Art Basel. Mais il souligne que le développement du numérique sera la clé de son succès, faisant allusion à la rumeur de la création d’une place de marché en ligne pour les galeries, ouverte toute l’année. Néanmoins, il maintient que les événements physiques resteront au cœur de l’activité d’Art Basel : « Après le Covid, il y a un énorme appétit pour les événements dans le monde réel – les œuvres d’art ont toujours besoin d’être vues directement ». Il affirme qu’il s’appuiera sur les contributions de son prédécesseur, qui a fait d’Art Basel « quelque chose de plus qu’une simple marque de foire ».
En effet, Marc Spiegler a dirigé la société à une période de changements et de croissance majeurs pour Art Basel, notamment le lancement de deux nouveaux sites par la foire : à Hong Kong en 2013 et à Paris cette année.
La dernière partie de son mandat en tant que directeur mondial a coïncidé avec des turbulences au sein de MCH et du secteur des foires en général, la pandémie ayant durement touché les événements en direct, obligeant Art Basel à annuler ou à réduire la taille d’un certain nombre de ses événements. Ces dernières années, MCH s’est désengagé financièrement de plusieurs autres projets et l’un de ses événements phares, Baselworld, a frôlé la faillite. Un énorme investissement de 46 millions d’euros réalisé par James Murdoch en 2020, par l’intermédiaire de sa société d’investissement privée Lupa Systems, a permis à la marque de retrouver une stabilité financière après les pertes de Covid, tout en provoquant une restructuration majeure. À cette occasion, James Murdoch est devenu actionnaire principal de la société. Récemment, MCH a investi dans des foires en Asie de l’Est et d’autres projets artistiques tels qu’Art SG à Singapour (janvier 2023) et Art Week Tokyo (du 3 au 5 novembre 2022), car la pérennité à long terme de Hong Kong en tant que centre artistique de la région reste incertaine.
Parmi les initiatives lancées sous le mandat de Marc Spiegler à la tête d’Art Basel, figure la baisse des frais pour encourager la participation des petites galeries. Il a également mené des initiatives moins réussies, comme l’annulation d’une conférence de trois jours à Abou Dhabi, dont le prix d’entrée était de 15 000 dollars, et la première et unique édition d’Art Basel Cities à Buenos Aires.
Marc Spiegler, citoyen américain et français, a commencé sa carrière dans le monde de l’art en tant que journaliste, écrivant pour des publications telles que New York Magazine et The Art Newspaper, pour lequel il a notamment travaillé sur certains des premiers quotidiens de foires, dont ceux pour Art Basel Miami Beach, qu’il allait diriger quelques années plus tard.
Dans un communiqué, Marc Spiegler a déclaré : « Après la première édition réussie de Paris+ et le 20e anniversaire imminent d’Art Basel Miami Beach, je quitte Art Basel sur une bonne note. Concevoir la prochaine étape de l’évolution d’Art Basel demandera de nombreuses années et un panel différent de compétences. Le moment est venu de passer le relais ».