La définition d'un musée a changé de manière significative pour la première fois depuis 50 ans après un vote unanime des membres du Conseil international des musées (ICOM) à Prague le 24 août. Les représentants de plus de 500 musées du monde entier ont voté en faveur de la nouvelle définition lors de l'assemblée générale extraordinaire de l'ICOM dans la capitale de la République tchèque, avec 92 % de voix en faveur de la nouvelle définition. Elle inclut, pour la première fois, des expressions telles que « inclusivité », « accessibilité », « durabilité » et « éthique ». Alberto Garlandi, le président de l'ICOM, a déclaré que la nouvelle définition « faisait consensus pour les musées du monde entier ». « Cette nouvelle définition s'aligne sur certains des changements majeurs du rôle des musées aujourd'hui, a-t-il précisé à The Art Newspaper. Nous avons été contraints de changer. Je pense vraiment que cette décision va améliorer le rôle du musée dans le monde entier. »
La nouvelle définition, dans son intégralité, a été formulée comme suit : « Un musée est une institution permanente à but non lucratif au service de la société qui recherche, collecte, conserve, interprète et expose le patrimoine matériel et immatériel. Ouverts au public, accessibles et inclusifs, les musées favorisent la diversité et la durabilité. Ils fonctionnent et communiquent de manière éthique, professionnelle et avec la participation des communautés, offrant des expériences variées pour l'éducation, le plaisir, la réflexion et le partage des connaissances. »
Cette définition sera adoptée par l'Unesco et permettra de déterminer si de nouvelles galeries et institutions privées dans le monde peuvent se décrire comme un musée officiellement reconnu.
Ce texte a fait l'objet d'un intense débat. En 2019, lors de la dernière conférence de l'ICOM à Kyoto, au Japon, un consensus sur un projet de définition n'avait pas été atteint par l’assemblée générale avant qu'il ne soit soumis au vote. En l’absence de résolution, l'ancienne définition d'un musée – créée dans les années 1970 et modifiée pour la dernière fois en 2007 – continuait de s’appliquer.
« L'ancienne définition ne reflétait pas la réalité de l'ICOM ni celle des musées du monde entier », a déclaré à The Art Newspaper Bruno Brulon, coprésident de ICOM Define, le comité permanent chargé de la définition des musées. Ce dernier a reconnu que la nouvelle définition était nécessairement le résultat d'un processus de négociation. « Il s’agit d’un compromis, explique-t-il. Nous avons dû discuter avec des personnes ayant des perspectives très différentes. Certaines d’entre elles pensent qu'un terme tel que rapatriement est un mot très politique. Mais cette nouvelle définition reste, je pense, une déclaration très progressiste. »
Des termes tels que décolonisation, rapatriement et restitution – questions centrales pour de nombreux musées du monde en développement – restent notablement absents de la nouvelle définition. Des voix importantes, y compris des porte-parole des comités nationaux de l'ICOM, ont déclaré que la définition n'était pas assez progressiste et qu'elle était peut-être le résultat d'un compromis excessif de la part des organismes plus conservateurs de la communauté muséale.
« Pour être honnête, ce n'est pas assez progressiste pour moi », a déclaré Chang In-kyung, directeur fondateur du Iron Museum [Musée du fer] à Séoul, en Corée, et vice-président de l'ICOM Corée, lors d'un débat sur la nouvelle définition. « Mais nous devons trouver un terrain d'entente. N'importe quel musée peut désormais la prendre et l'utiliser. Elle peut être interprétée. Peut-être que ce n'est pas assez fort, mais vous pouvez faire des choses fortes dans votre musée. »
Muthoni Thangwa, responsable du développement aux Musées nationaux du Kenya et porte-parole des comités internationaux de l'ICOM, a rendu hommage à la définition au cours du panel. « Nous sommes la génération qui a choisi de faire des changements, a-t-elle déclaré. C'est le moment de la transformation ; le moment de repenser l'idée d'un musée. » Néanmoins, elle a regretté que le terme « restitution » (processus par lequel une œuvre d'art ou un artefact est définitivement retiré de la collection d'un musée, souvent pour retourner à son lieu de provenance) ne soit pas inclus ou reconnu dans la nouvelle définition. Selon elle, le retour d'artefacts à des nations autrefois colonisées et aujourd'hui indépendantes correspond à une réalité dans le monde entier, mais n'a pas été reconnu de manière adéquate par l'ICOM.
« Nous sommes assis ici et nous débattons de ce que devrait être et de ce que peut être un musée, mais la vie, le monde et les forces de l'activisme actuel dans le monde ont mis en mouvement un nouveau musée. Ce nouveau musée existe bel et bien, a-t-elle déclaré. Que nous le définissions ou non, il est déjà en mouvement. Mesdames et messieurs, cela va se produire. C'est l'avenir de notre secteur. » Et de citer des exemples récents de restitution concernant le British Museum au Royaume-Uni, le Forum Humboldt en Allemagne et la Smithsonian Institution aux États-Unis.
« J'espère qu'à un moment donné, la définition du musée pourra devancer les processus de restitution auxquels on assiste dans le monde, a-t-elle poursuivi. Nous ne pensons pas assez aux communautés à qui ces précieuses œuvres vont être rendues. Elles doivent les réintégrer dans leur culture vivante, ce qui est beaucoup plus difficile que de les restituer. Nous devrions le reconnaître. »
L'élaboration d'une nouvelle définition est le résultat du plus grand projet de sensibilisation de l'histoire de l'organisation. Les représentants des musées de 126 comités nationaux de l'ICOM, soit plus de 50 000 membres, ont été consultés pendant 18 mois et au cours de quatre cycles de consultation distincts par le comité ICOM Define. Les musées d'Afrique, d'Amérique latine et d'Asie-Pacifique ont été largement consultés lors de l'élaboration de la nouvelle définition.
Les détails de la mise en œuvre matérielle de la définition doivent encore être précisés. Un nouveau président et un nouveau conseil d'administration seront élus lors de la prochaine assemblée générale ordinaire de l'ICOM et se réuniront ensuite « en temps utile pour définir les prochaines étapes de la mise en œuvre et de l'adoption de la nouvelle définition ».