Chaque installation de l’artiste français Julien Creuzet (né en 1986) est une œuvre d’art totale qui englobe le visiteur dans un univers hybride associant poésie, vidéo, son et sculpture. En écho à la subjectivité de l’histoire, ses environnements complexes s’articulent autour de différents héritages et approches, géographies et temporalités, points de vue et voix, techniques et supports. C’est un récit aux multiples strates que Julien Creuzet entend partager, pour lequel il fait appel à des imaginaires lointains qu’il confronte aux legs culturels minoritaires et aux réalités sociales contemporaines. Ce télescopage s’inscrit dans sa volonté de « complexifier l’acte de regarder » à travers des œuvres invoquant « poésie et politique, objets trouvés et dispositifs technologiques, expérience personnelle et attention au monde ».
Son projet pour le Centre Pompidou s’inscrit dans ce contexte. Constitué essentiellement d’éléments suspendus – ses fameuses sculptures faites de matériaux multiples, objets trouvés et formes modelées par l’artiste –, l’ensemble est inspiré d’une série d’illustrations convoquant la mémoire visuelle des colonies. L’installation rend par ailleurs hommage à Jacques Coursil, célèbre trompettiste de jazz, mathématicien et philosophe des mathématiques, décédé en 2020, avec qui Julien Creuzet échangeait. Sur des échantillons musicaux de trompette joués par Jacques Coursil, l’artiste chante sa propre poésie, croisant le tout avec les codes de production des musiques urbaines. En marge de cette installation, Julien Creuzet présente une vidéo d’animation dans laquelle un homme extirpe de lui-même des références bibliographiques de grandes figures littéraires panafricaines du XXe siècle, hommage biblio-viscéral à l’histoire de l’Afrique et de sa diaspora.