Isabelle Cornaro (née en 1974) décortique « la pulsion de possession qui nous lie aux objets » et la manière dont l’être humain « essaye de se prolonger à travers les objets qu’il convoite ou possède ». Héritière de l’art conceptuel, l’artiste française mène une pratique pluridisciplinaire (installation, peinture et vidéo), qui vise à déconstruire notre rapport et notre regard sur les objets et leurs images. Avant d’étudier au Royal College of Art, à Londres, et aux Beaux-Arts de Paris, Isabelle Cornaro a suivi une formation en histoire de l’art, spécialisée en peinture de paysage, à l’École du Louvre (Paris). Cette rencontre entre théorie et pratique se reflète dans son travail, qui croise démantèlement des structures sous-jacentes à l’histoire de l’art et remise en question de la notion de « valeur » au sein de cette discipline. Ses œuvres interrogent les systèmes de représentation des images et révèlent la construction des mécanismes culturels conditionnant notre regard.
L’installation centrale de son projet pour le Prix Marcel Duchamp s’inscrit dans la continuité de sa série Paysages, pour laquelle elle transforme des paysages classiques du XVIIe siècle en installations qui reproduisent les différents plans qui les composent en volumes épurés, oscillant entre sculpture minimale et socle. Cette conceptualisation de chaque plan permet à l’artiste d’imiter les structures de hiérarchies du regard qui sont à l’œuvre dans ces peintures et de réfléchir à la manière dont ces compositions servent à mettre en valeur certains éléments. Des éléments qu’Isabelle Cornaro remplace par des objets, posés sur chaque socle, et qu’elle qualifie « de pacotille », parfois factices, grotesques ou désuets, avec lesquels on peut entretenir un rapport ambigu. Derrière ce regard sur l’histoire de l’art, elle procède à un véritable examen de notre relation, souvent de dépendance ou d’attraction-répulsion, avec ces objets issus d’une industrie standardisée. À côté de cette « version la plus pop de ses Paysages », Isabelle Cornaro présente sa première vidéo d’animation, Eyessore, nourrie de films expérimentaux des années 1970, de la science-fiction de David Cronenberg et de l’esthétique manga, mêlant objets et corps en mutation.