Beaufort 2021
Comme en 2018, le commissariat de Beaufort 21 a été confié à Heidi Baillet. Cette exposition à ciel ouvert a été créée en 2003, à l’initiative de Willy Van den Bussche, alors directeur du musée provincial d’Art moderne d’Ostende – devenu en 2009 le Mu.ZEE. Destination favorite des Belges pour une escapade au grand air, les quelque 65 kilomètres qui constituent la côte rassemblent une dizaine de villes et stations balnéaires, de la frontière française (La Panne) à celle des Pays-Bas (Knokke), en passant par « la reine des plages », Ostende.
Si cette triennale d’art contemporain complète de façon temporaire l’activité culturelle tout au long de l’année dans les musées d’Ostende, les galeries de Knokke et à la Fondation Paul-Delvaux (Saint-Idesbald), son intérêt est de s’inscrire dans le temps. En effet, parmi les œuvres installées le long du littoral, de la digue ou des dunes, certaines sont vouées à devenir permanentes. C’est le cas de la gigantesque pieuvre en bronze de Laure Prouvost, de l’arbre du même métal d’Els Dietvorst, du « module familial » en béton de Goshka Macuga, des métamorphoses d’Oliver Laric, de l’empilement de Rosa Barba, du personnage enfantin de Maen Florin, de l’étonnant animal marin futuriste de Marguerite Humeau ou du toboggan-sculpture caméléon de Jeremy Deller. Toutes ces œuvres récentes manifestent une préoccupation écologique ou s’interrogent sur l’histoire et les enjeux de cette zone singulière qui définit le littoral belge, jusqu’à il y a peu sévèrement impacté par la promotion immobilière.
pour Beaufort21, si le dialogue avec l’horizon et les marées va de soi, celui avec le patrimoine urbanistique ou naturel du littoral, et son histoire, n’est pas négligé.
Les précédentes œuvres pérennes de la Triennale d’art du littoral continuent d’interpeller, tant les touristes d’un week-end que les habitants de la région. Pour cette 7e édition, si le dialogue avec l’horizon et les marées va de soi, celui avec le patrimoine urbanistique ou naturel du littoral, et son histoire, n’est pas négligé.
Le long de la côte ou dans ses villes, on découvre ainsi des installations de Matt Mullican, Anne et Patrick Poirier, Jan Fabre, Daniel Buren, Wim Delvoye, Daniel Spoerri, Niek Kemps, Jason Dodge, ou encore le labyrinthe de Jan Vercruysse à Knokke.
la triennale de Bruges
Relancée en 2015, cette nouvelle triennale à vocation internationale se distingue de ses prédécesseures des années 1960-1970, axées sur les artistes belges. En s’ouvrant également à l’architecture contemporaine, elle permet un dialogue de qualité entre le riche passé patrimonial de la ville et le XXIe siècle. Après des éditions consacrées aux thématiques de la mégapole (2015), puis d’une ville fluide et flexible (2018), cette troisième mouture aborde le revers de cette destination historico-touristique, sous l’intitulé « TraumA ». Les treize artistes et architectes invités à travailler sur la ville de Bruges ont donc exploré sa face cachée – parfois avec l’appui de ses habitants –, qui ne correspond pas à l’image que s’en fait le grand public et dans laquelle les responsables municipaux veulent éviter de s’enfermer. Les maîtres-mots de cette édition sont l’imagination, la beauté, l’obscurité et la participation, associés dans un « récit polyphonique ».
Parmi les interventions les plus marquantes, retenons l’intrigant carrousel fixe de Hans Op de Beeck, Danse macabre. De grandeur nature mais statique et silencieuse, l’œuvre en impose par sa monumentalité, renforcée par un gris uniforme qui accentue l’effet de pétrification d’un engin habituellement sonore et en mouvement. Cette installation peut être vue comme une actualisation de la mythologique Bruges-la-Morte*1. Au détour d’une façade, d’un jardin, d’une place, on découvre aussi les interventions ciblées d’Amanda Browder, de Nadia Kaabi-Linke, de Hector Zamora, le passage sombre de Gregor Schneider, le pavillon en bois de Jon Lott ou la gigantesque liane de Henrique Oliveira qui, semblant surgir du canal, grimpe le long d’un ancien mur d’enceinte.
Enfin, sous l’élégant titre « La Ville poreuse », et en écho aux œuvres d’extérieur, une exposition collective rassemble une quarantaine d’artistes belges et internationaux à la Poortersloge. Dans cette ancienne demeure bourgeoise, le rapport à l’art se fait plus intime, tout en favorisant des confrontations parfois radicales.
Paradise Kortrijk
Pour sa deuxième édition, la Triennale d’art contemporain de Courtrai a invité une trentaine d’artistes internationaux à réfléchir à un double concept : le « paradis » (qui donne son titre à la manifestation) et l’« utopie » (qui en constitue le corollaire). Le point de départ de la réflexion est le suivant : « La représentation du paradis pose-t-elle principalement la question de savoir comment créer une société meilleure pour tous ? » Autrement dit, cette dimension utopiste du questionnement doit-elle être recherchée du côté des penseurs, des écrivains, des architectes, des urbanistes et des artistes, plutôt que de celui des hommes politiques, des économistes et des conseillers ? Ceci n’empêche pas l’esprit d’entrepreneuriat dans une ville qui a fait du design contemporain son cheval de bataille au sens large. Ainsi, Viktor & Rolf, Albert Dubosq ou William Forsythe ont été invités à réfléchir sur cette thématique, au même titre que Yoko Ono, Ugo Rondinone, Ryan Gander, Olaf Nicolai, Luc Deleu, Kendell Geers, Joris Van de Moortel, Jeremy Deller, Dora Garcia ou Berlinde De Bruyckere, parmi bien d’autres.
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*1 Roman symboliste de Georges Rodenbach publié en 1892.
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Beaufort 21, 27 mai-7 novembre 2021.
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Triennale Bruges 2021 (« TraumA »), 8 mai-24octobre 2021.
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Paradise Kortrijk 2021, 26 juin-24 octobre 2021.