En choisissant d’exposer Enrico David, la défunte Chiara Fumai et Liliana Moro, le commissaire du Pavillon italien Milovan Farronato semble suivre les pas de Cecilia Alemani, qui l’a précédé. Qui connaît sa manière de concevoir les expositions ne pouvait néanmoins s’attendre à de grands bouleversements. Son projet, intitulé «Ni ni. Le défi du labyrinthe», est conçu à la manière d’un véritable labyrinthe. Le commissaire précise que l’exposition est «enracinée dans la générosité plutôt que dans la claustrophobie, qu’elle responsabilise les visiteurs en leur demandant de prendre des décisions».Parmi les œuvres que l’on peut y découvrir – ou manquer, comme souvent dans un labyrinthe –, figurent de nouvelles créations de Liliana Moro, certaines récentes, d’autres n’ayant jusqu’à présent pas dépassé le stade de l’idée – ébauchées en atelier et laissées dans cet état «potentiel».
Quant à Enrico David, ses dernières œuvres côtoient des pièces antérieures que Milovan Farronato considère comme «importantes». Enfin, pour ce qui est de Chiara Fumai, le commissaire a décidé de faire réaliser une œuvre dont il avait discuté avec l’artiste, mais qui n’a pas été achevée en rai-son de sa mort brutale. Interrogé sur les points communs qui relieraient ces trois créateurs, Milovan Farronato –qui a entretenu une relation intime et de longue date avec chacun d’eux – considère tout d’abord qu’«aucun n’a jamais renoncé à rien», c’est-à-dire qu’ils expérimentent sur tous les supports et dans tous les langages. De plus, «ils font ce qu’ils pensent», une posture éloignée de la tendance actuelle en art de déléguer la production. Enfin, le commissaire les dit «authentiques et autographes», évoquant la très grande proximité entre leurs espaces de vie et de travail (par exemple, la maison et l’atelier de Moro se font face).
Bien qu’il soit souvent très difficile, voire contre-productif, d’associer un style particulier à un curateur, le Pavillon italien est cette année chargé d’une atmosphère singulière – un terme plus approprié que celui de style –, incitant le visiteur à une rencontre physique avec des œuvres qui ne se «défendent» ni par un discours politique, ni par le spectaculaire, ni par l’appropriation des nouvelles technologies, ni par des mégaproductions. Bien au contraire,dans une sorte de détournement – très à propos à Venise –, nous sommes invités à ranger nos téléphones portables (oubliez «l’effet Anne Imhof» [Lion d’or de la Biennale 2017]) et à accepter de nous perdre, à la recherche de moments d’intimité avec des objets fabriqués (David), imaginés (Moro) ou performés (Fumai).
«Né altra né questa : la sfida del labirinto», Pavillon italien, Arsenale