Âgés de 25 et 24 ans, Dolly Kola-Balugun et Abdullahi Umar, les fondateurs de Retro Africa, sont les plus jeunes galeristes du Nigeria. À la sortie de l'université King's College, à Londres, en 2015, ils se sont mobilisés devant l'intérêt soudain porté par le marché de l'art au continent africain. Pourquoi ce nom, Retro Africa ? Parce qu'ils pensent que le passé influence toujours le futur.
« Aujourd'hui, c'est l'âge d'or de l'art contemporain africain. Sotheby's et Bonhams ont créé des départements entièrement dédiés au continent. Mais je m'attristais de constater que de nombreux artistes africains n'étaient représentés que par des galeries occidentales », souligne Dolly Kola-Balugun. Plutôt que de s'installer à Lagos, peuplée de 21 millions d'habitants, ils ont ouvert une plateforme sans espace fixe à Abuja, qui n'en compte que 2,2 millions, dans le Nord musulman, plus conservateur. « Nous avons pour but d'étendre la culture de l'art contemporain de Lagos au reste du pays. La scène est vibrante mais la population n'est pas encore sensibilisée. Le fait que 1-54 se tienne depuis deux ans sur le continent est un aspect essentiel de ce développement. »
Retro Africa représente un certain nombre d'artistes nigérians, ou liés au pays, comme El Anatsui, qui est d'origine ghanéenne mais a étudié au Nigeria, où il a son atelier. Ils travaillent aussi ponctuellement avec des créateurs représentés par d'autres galeries du continent. Récemment, à Art X Lagos, ils ont montré Amadou Sanogo, Paul Onditi, Henri Abraham Univers et Duke Asidere, originaires respectivement du Mali, du Kenya, du Burkina Faso et du Nigeria.
Une galerie qui prend son essor
« Nous sommes une galerie panafricaine basée au Nigeria. Depuis peu, nous avons aussi un partenariat avec la Galerie Medina, à Bamako [Mali]. Ensemble, nous avons été invités par Adam Symezyk à la Documenta [en 2017]. Nous cherchons désormais à créer des liens concrets entre le Nigeria et le Mali. Par exemple, nous avons exposé des tapis d'Abdoulaye Konaté avec des photos de John Kalapo. En Afrique, la barrière culturelle entre le monde francophone et le monde anglophone est vraiment regrettable. » Parfaitement francophone, Dolly Kola-Balugun a été pensionnaire en internat à Bordeaux et à Maisons-Laffitte.
Leurs premiers collectionneurs étaient basés au Nigeria puis, en participant à des foires internationales comme 1-54 à Londres et à New York, ils ont pris contact avec de nouveaux réseaux. Un partenariat avec la plateforme Artsy leur offre aussi un accès à des collectionneurs du monde entier. Pour la première fois cette année, juste avant 1-54, Retro Africa participe à Cape Town Art Fair. « Le style de 1-54 sera beaucoup plus intime. Les deux foires sont très importantes, l'une pour l'Afrique du Nord, l'autre pour l'Afrique subsaharienne. »
Retro Africa, 12 Ukpabi Asika Street, Asokoro, Abuja, Nigeria