Son avenir aura fait couler beaucoup d’encre, et motivé des pétitions et des recours en justice. Malgré la mobilisation des défenseurs du patrimoine et des vieilles pierres, la chapelle Saint Joseph de Lille est en cours de destruction.
Dû à l’architecte Auguste Macrou(1823-1911), cet édifice construit en 1886 et non classé était désacralisé depuis 2002 et désaffecté. Son propriétaire, le groupe Yncrea – qui compte trois écoles d’ingénieurs et relève de l’université catholique de Lille – a décidé depuis de nombreux mois de déployer à sa place un vaste campus universitaire. La mairie de Lille avait délivré un permis de démolir en mai 2019. En dépit de la mobilisation légitime pour la sauvegarde de ce monument, le ministère de la Culture ne s’est pas opposé à sa démolition, ne lui reconnaissant pas une importance majeure dans l’histoire de l’architecture. Cette affaire touche un point sensible: faut-il conserver tous les bâtiments du passé quelle que soit leur valeur ?
Ce n’est pas parce qu’une œuvre est ancienne qu’elle est forcément un chef-d’œuvre, nous avait déclaré en substance le grand historien de l’art Daniel Arasse en 2003 : « je pense que dans la création contemporaine il y a autant de déchets qu’il y en avait dans la production de la Renaissance. Quand on voit le nombre de croûtes entreposées dans les musées, des tableaux que l’on admire parce qu’ils sont Renaissance ! Allez dans certains musées d’Italie du Nord ou des Abruzzes, c’est d’une tristesse épouvantable. Mais ces croûtes ont maintenant le charme des choses anciennes ». Notre devoir est bien entendu de protéger au mieux les chefs-d’œuvre de l’architecture du passé, ceux qui ont donné à nos villes la physionomie que nous leur connaissons. Mais il serait aussi un non-sens de figer nos cités dans une époque révolue, sans pouvoir les ouvrir à la création la plus actuelle, tant du point de vue de l’esthétique que des usages. Un vaste débat.